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IDEES

Art et climat, état des lieux et perspectives

Alors que les conséquences du changement climatique sont de plus en plus visibles sur les sociétés et les écosystèmes naturels, les artistes s'emparent de plus en plus du sujet pour exprimer leur sentiment, alerter, agir et dénoncer. Tour d'horizon.

Temps de lecture 4 mins - Emma Kapousouzian

Résumé

- L'art pour agir.
- L'art pour alerter.
- L'art et la culture sont utilisés pour sensibiliser à l'urgence climatique, mais leurs limites doivent être reconnues.

L'art a vraiment le pouvoir de changer les gens, et donc, notre avenir. - Leonard Bernstein.
L’art qui est un moyen dérivé de la culture pour attirer l’attention avec douceur et sans donner de leçon, offre la possibilité aux artistes de faire réfléchir le grand public à la conception de nos sociétés, à nos modes de consommation, et incite même à la mobilisation. Dans un contexte d’urgence climatique, et de réchauffement de la planète, on a vu naître une nouvelle forme d’art : l’art écologique.
Ces artistes modernes cherchent à travers divers médias artistiques (peinture, photographie, musique et cinéma) à diffuser des messages engagés en faveur de la lutte contre le dérèglement climatique. Ce mouvement artistique a rapidement gagné en force et en impact au cours de ces vingt dernières années, et apparaît comme une nouvelle médiation dans laquelle le public se sentirait plus concerné et par conséquent plus à même à s’engager vers un changement de comportement en faveur du climat.
De quelles façons l’art, peut-il s’engager, se mettre au service de la cause environnementale ? l’art déclenche les prises de conscience et pousse à l’action. Il est utilisé pour dénoncer le dérèglement climatique. Etat des lieux :

L'art pour agir

Pour défendre quelque chose, il faut le connaître. En effet, la conscience est la première étape
de l’action et celle-ci commence par une sensibilisation sur le sujet.
Mais comment faire quand les mots « gaz à effet de serre », « forçage radiatif » ou encore « acidification des océans » ne font pas sens pour l’opinion publique ? Un artiste vous répondrait, il faut redoubler de créativité. L’art et notamment l’art écologique permet en effet de rendre les ordres de grandeurs, les constats du dérèglement climatique produits par les scientifiques, bien plus accessible au grand public. Il vise la prise de conscience et le changement de comportement en construisant des modes de vie plus soutenables et en mobilisant le public grâce aux émotions suscités par l’art.

De nombreux artistes ont cherché à déclencher ses prises de conscience sur les enjeux climatiques, comme le sculpteur italien Lorenzo Quinn qui utilise souvent la technique du land art soit la réalisation d’œuvre dans un milieu naturel pour dénoncer par exemple la montée des eaux à Venise avec sa sculpture de main sortant de l’eau et s’agrippant à la façade d’un hôtel.
Ou encore le photographe Daniel Beltra qui grâce à ses prises de vue aérienne permet de souligner les limites dépassées de notre planète, comme l’une de ses images très connue de la marée noire dévastatrice de Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique.

On pourrait également citer le Recycled Art, où de nombreux artistes utilisent des matériaux recyclés dans leurs créations afin de sensibiliser sur la crise de pollution et la culture de consommation. Aujourd’hui, on peut en tout cas définir la culture comme moteur de changements de comportements et permet de développer un nouveau rapport au monde.

L'art pour dénoncer

Certains artistes, lanceurs d’alerte vont plus loin que la sensibilisation en cherchant à divulguer et à dénoncer certaines activités humaines, les effets du dérèglement climatique ou encore le déni et l’inaction de nos dirigeants. C’est notamment le cas du film Don’t look up, qui malgré les avis controverses est le résultat d’une métaphore du déni face au changement climatique. Ce film satirique raconte l’histoire de deux astronomes qui tentent d’alerter les politiques, les médias et la société sur l’arrivée d’une comète large de 9 kilomètres qui entrera en collision avec la Terre et la détruira entièrement dans six mois.

Cette sombre satire dénonce très clairement le triangle de l’inaction, où les individus, les politiques et les entreprises se renvoient la balle pour pointer les responsabilités des autres. Il démontre également ce décalage de niveau d’information et de compréhension du sujet entre les scientifiques et les dirigeants, les médias et le grand public. Aujourd’hui, la culture permet également à certains activistes de s’emparer des enjeux climatiques en dénonçant l’inaction et l’hypocrisie des responsables politiques.

Depuis quelques années, cette dénonciation a lieu dans les musées. Le musée étant un lieu d’exposition, agir entre ses galeries revient à transformer de fait son action revendicatrice en « happening », en performance artistique, qui mérite finalement autant l’attention qu’une œuvre d’art. Ses activistes cherchent à déclencher une prise de conscience chez le grand public, en utilisant l’art, qui est universel, durable dans le temps et qui est par conséquent bien plus percutant. C’est notamment le cas, de deux militantes écologistes du mouvement Just Stop Oil qui s’en étaient prises au chef-d’œuvre de Van Gogh, Les Tournesols à la National Gallery de Londres. Ou encore des militants viennois qui ont aspergé de liquide noire La Vie et la Mort, un chef d’œuvre de Gustav Klimt.

"Artists for Climate is an open call for digital illustrations, graphic design, lettering art and typography. The initiative sought awe-inspiring designs that depict a hopeful future around climate change, or have a clear message around the urgency for actionable change." - Artists for climate

Ces deux actions visaient à dénoncer l’utilisation excessive des énergies fossiles, qui est l’une des principales causes du réchauffement climatique. De plus, les interruptions d’événements sportifs sont de plus en plus utilisées par les activistes écologistes pour dénoncer et alerter le grand public sur le réchauffement climatique, c’était le cas lors du tournoi de Roland-Garros, un Grand Prix de Formule 1 ou encore le Tour de France de l’été dernier. Ces interruptions leur permettent également d’avoir une très bonne couverture médiatique.

L'art et la culture sont utilisés pour sensibiliser à l'urgence climatique, mais leurs limites doivent être reconnues.

L’utilisation de la culture pour sensibiliser le public, pousser à l’action nos dirigeants, créer de l’audience médiatique ou tout simplement ouvrir la voie à d’autres types d’actions plus ou moins radicales semblent être le nouveau levier d’action pour les personnes écologiquement engagées. Finalement, les artistes et les activistes écologiques ont le même objectif final, à savoir utiliser l’art
et plus généralement la culture pour attirer l’attention sur le changement climatique.

Néanmoins, aujourd’hui, on ne peut pas affirmer que l’art sauvera complètement la planète, car il n’est pas totalement dégagé de sa dimension poétique, qui est, en soi incompatible avec un militantisme pur et dur. Tout comme l’activisme écologique radical qui peut s’avérer comme contre-productif et éco-terroriste quand il s’attaque à des œuvres historiques et protégées. Ainsi, on pourrait se demander sur quel terrain les artistes et les militants écologistes peuvent se rejoindre et cibler une cause commune soit le climat, sans la décrédibiliser ? Finalement, quelles sont les limites de la culture dans la lutte contre le dérèglement climatique ?